La Chambre de Nora

Nora écrivait dans son journal. À fur et à mesure qu'elle poursuivait sa rédaction des larmes perlaient de ses yeux et elle maniait sa plume en coups de plus en plus violents. Elle venait tout juste d'avoir un entretien avec ses parents qui a finit, comme à l'habitude, dans des éclats de colère, des cris et des sanglots. Nora aimait ses parents, et elle les admirait pour le travail qu'ils accomplissaient en tant que dirigeants du peuple. Cependant, ils la poussaient vers un futur pour lequel elle n'est pas faite, car la jeune fée détestait les conflits, avait pitié de tous et n'aimait pas prendre de grosses décisions. Donc, pour se défouler et se calmer, elle écrivait:
«Cher Journal,
Je n'en peux plus. Mes parents m'ont dit qu'ils ne veulent plus que je fréquente mes amis du village. Ils affirment que je perds mon temps, que je devrais me trouver des amis "avec qui j'ai plus de choses en commun" et que l'amitié passe après les travaux au château. Fête après fête, réunion après réunion, le peuple commence à remarquer ton attitude rebelle, m'ont-ils dit. Mais ils ne comprennent pas, mes parents. Alors que je défends l'interêt du peuple, mes parents me grondent en disant que j'en connais trop peu sur l'importance d'une haute économie à l'intérieur du peuple lui-même. Moi, je trouve qu'on devrait se concentrer sur le peuple. Après tout, un peuple heureux est un peuple prospère. De plus, la menace de la guerre pèse de plus en plus lourd sur nos épaules. Les deux clans veulent notre collaboration, et j'ai peur que mes parents cèdent un jour à leurs demandes. Surtout que, bientôt, ça sera à moi de diriger ce royaume, et je ne tiens pas à ce qu'il soit en guerre.»
Furieuse, elle ferma son journal. Elle ne pouvait écrire ce qu'elle ressent dans son journal, car elle sait que ses parents demandent à ses dames d'honneur d'y jeter un coup d'oeil une fois de temps en temps. Frustrée de ne pas pouvoir s'exprimer, elle se jetta sur son lit, toute en pleurs. Puis, elle sécha ses larmes et avisa son épée qu'elle gardait toujours dissimulée dans un coffre en bois. «Juste au cas...», lui avaient dit son père lorsqu'il lui a donné, quelques mois après le début de la guerre. Des éclairs aux yeux, elle se leva pour le prendre dans ses mains et l'admirer. Une lame en métal tranchant lui renvoyait la réflexion d'une eune fille à l'air troublé aux yeux rouges et bouffis. Elle reporta son attention sur le manche en émeraude. Taillé par l'un des meilleurs sculpteurs du royaume, il représentait Nora assise sur une pierre entourée d'animaux et de plantes, qui regarde le ciel. Ses yeux étaient de vrais diamants d'une teinte de bleu pâle. Décidée, Nora se prit les cheveux dans une main et tenait son épée fermement dans l'autre. Puis, d'un coup net et bien ajusté, elle se les trancha à la hauteur des épaules. Dans le royaume, c'était un signe de guerre, ou de rébellion, chez les femmes. La guerre venait de débuter dans le château. Son futur et le futur du peuple sont en jeu.